Démarrer la pêche au brochet pour les noobs
Le brochet, en particulier le brochet européen, occupe une place spéciale dans le cœur des pratiquants de l’art halieutique. Avec ses dents en poinçon au fil de rasoir, son œil vide et fantomatique ainsi que son fuselage reptilien, le brochet n’a que peu changé en 60 millions d’années et conserve ainsi son look préhistorique si apprécié.
Il est le prédateur de l’Europe hyperboréale par excellence même si il a aujourd’hui colonisé toutes les parties du continent.
Que vous souhaitiez coffrer de la buchette, de la buche voire une poutre, voici un petit guide pour bien commencer. Une vie ne suffirait pas pour décrire la pêche au brochet, loin d’être exhaustif, cet article n’a que la prétention d’aider les débutants à mettre le pied l’étrier en donnant quelque bases, pas plus, pas moins !
Biologie
Membre de la famille des Esocidés, Esox Lucius ou brochet, est reconnaissable à son museau plat et large, son corps allongé et son arrête dorsale parallèle à l’arrête ventrale. le brochet d’eau saumâtres est souvent jaunâtre; les “brochets d’herbe” des lacs riches en végétation sont verdâtres. On retrouve de nombreuses variations du Nord au Sud mais de manière générale, plus il vieillit, plus sa robe s’assombrit et devient brunâtre ou grisâtre.
Selon le guide Delachaux des poissons d’eau douce, “les mâles ne croissent pas aussi vite que les femelles et lorsqu’il atteignent leur maturité à l’âge de 2 ou 3 ans, ils pèsent en moyenne 450gr pour une longueur de 25 à 40cm. Les femelles mûres ont généralement 40 à 55cm de longueur et pèsent 1/2 à 1kg à l’âge de 3 à 5 ans.” Même si tout aspirant pêcheur rêve du métré, il faut cependant savoir que les mâles survivent rarement jusqu’à atteindre 100cm pour un poids de 5 à 8kg, là où la femelle peut atteindre les 1,5m pour 35kg à plus de 30 ans, âge vénérable difficilement atteint dans nos eaux surpêchées mais pas introuvable en eaux russes par exemple.
Mâle ou femelle ?
L’ouverture uro-génitale située non loin de la nageoire anale, en zone ventrale vous permettra de déterminer si vous avez capturé un mâle ou une femelle: ces dernière ont une ouverture plus large et sont souvent plus ventrues.
Où et quand le trouver ?
De manière générale, le brochet étant un poisson territorial assez sédentaire, il privilégiera les zones proches de rives riches en plantes. Les mois de Septembre, Octobre et Novembre sont certainement la meilleure période pour pêcher le brochet en France mais cette fourchette varie en fonction des zones, comme en Amérique du Nord ou au Canada où la meilleure période se situe entre Avril et Juin. Peu après leur naissance, ils rôdent dans les bas-fonds à la recherche d’insectes, mais c’est dès la première année que leur nourriture est majoritairement constituée de poissons: vandoise, gardon, rotengle et l’ablette constituent son régime alimentaire, ainsi que le hareng lorsqu’on remonte au nord de l’Europe.
Le pêcheur avec une bonne connaissance de ces poissons fourrages et de leur comportement aura alors un véritable avantage tactique, spécialement pour l’exercice difficile du street fishing. En dehors des poissons, le brochet est un opportuniste qui peut se nourrir de grenouilles, canetons et autres créatures d’eau en plus d’être un cannibale invétéré (il n’est pas rare de voir le broc que vous venez de coffrer se faire attaquer par un congénère plus imposant!).
Il vous faudra donc suivre ses proies pour pouvoir le débusquer. Leur emplacement dépend de la période de l’année mais avant tout de la température de l’eau:
En automne et en hiver, lorsque le mercure baisse, les gardons et brèmes vont par exemple chercher une température constante dans les eaux centrales plus profondes (thermocline) et auront donc tendance à se regrouper à ces endroits… et les brochets ne seront pas loin, quadrillant un territoire qu’ils protégeront à tout moment, (sauf en période de fraie où males et femelles oublient leur plus basiques instincts de défense.)
En eau chaude, ça se complique: les poissons fourrages seront dispersés, généralement dans les zones les moins profondes, ce qui signifie que le brochet peut être n’importe où….
Recherchez les trous d’eau qui sont des points d’arrêt notables pour les prédateurs, car ils peuvent se tenir dans des eaux plus profondes, attendant que les proies entrent ou sortent des bas-fonds avant de déclencher l’attaque. Prospectez également tout type de structure sous-marine (racines, branches, sous berges, herbiers) car les brochets ont tendance à rechercher un coin sombre et camouflé où ils peuvent attendre en embuscade. Mettez vous dans la tête d’un prédateur: l’économie de l’effort est le maître mot; il faut donc repérer les coins les plus propices à l’attaque furtive.
Les canaux, rivières et bateaux amarrés méritent également d’être ciblés, surtout ceux qui sont habités pendant l’hiver, car une légère augmentation de la température de l’eau sous le bateau amènera les petits poissons à se regrouper sous leur coque, et le brochet suivra.
Que vous pêchiez dans un canal, une rivière ou un lac, déplacez-vous en faisant quelques lancers de leurre souple de taille moyenne à chaque endroit jusqu’à ce que vous provoquiez la touche ou le suivi, ce qui vous permettra de déterminer à peu près où le brochet stationne, bien souvent à proximité des bancs de fourrage pour ensuite passer à des leurres plus spécifiques.
Manipulation
Il convient de prendre des précautions toutes particulières lorsque l’on sort un brochet, en raison de ses dents acérées mais aussi pour éviter tout risque de le blesser.
A moins de 4kg et en dessous de 50cm, vous pouvez le saisir à l’arrière de la tête (derrière l’œil). Entre 60 et 85cm, il est impératif de le porter par l’arrière de la plaque branchiale, juste sous la mâchoire tout en soutenant l’arrière du poisson.
Les plus gros brochets doivent être pris au filet et maîtrisés avec une prise ferme. Les pinces à bec effilé sont indispensables et les écarteurs de mâchoire peuvent être utiles.
Ecrasez vos ardillons pour accélérer les extractions et moins abimer la bouche, l’idéal étant de les décrocher dans l’eau ou à minima sur un tapis. Evitez d’exposer les lamelles respiratoires des branchies aux UV (valable pour n’importe quel poisson.)
Montages
1. Commençons par le bas de ligne
Autant le dire tout de suite: un brochet moyen coupera votre bas de ligne si celui-ci est trop fin, vous devez donc toujours utiliser un fluorocarbone lourd (minimum 0.70) ou un bas de ligne acier/titane. De préférence, favorisez une longueur de bas de ligne située entre 50 et 60cm avec idéalement un nœud de raccord FG car celui-ci passera mieux dans les anneaux de votre canne (en particulier par le sion).
2. Du bon type de leurre
De manière générale, l’utilisation des leurres est une approche qui convient bien aux mois les plus chauds où l’on va utiliser des leurres de petite à moyenne taille puis aux mois d’automne où l’on pourra alterner entre des leurres de moyenne et grande taille, période où le brochet effectue le plus de sprints de chasse. C’est à ce moment que les brocs sont le plus dispersés et ce type de prospection vous aidera à parcourir plus de surface.
Côté coloris, Le blanc, le jaune et le chartreuse sont excellents, probablement parce qu’ils ressemblent au ventre d’un poisson alimentaire en difficulté. Le fire-tiger provoque pour sa part beaucoup de suivis et d’attaques car il semblerait qu’il stimule l’instinct territorial du brochet.
Les spinnerbaits
Au début du printemps, avant que la croissance des herbiers ne devienne un problème, les spinners sont une bonne alternative qui permet de lancer loin par rapport à leur taille et qui projette beaucoup d’éclats de lumière, très attractif notamment sur les jeunes brocs. Associez les à un grub ou shad trailer avec nage et coloris différents pour créer du contraste. Dans une eau colorée, favorisez une jupe chartreuse.
Les jerks
Il s’agit de leurres volumineux brassant beaucoup d’eau sur leur passage. bruiteurs ou non, ces leurres à la nage erratique sont très efficaces pour provoquer un reflexe territorial chez le brochet et générer l’attaque lors des pauses entre chaque animation.
En suspending, il permet de faire de belles récupérations ponctuées de pauses.
Côté animation, en début de saison, les lancers-ramener sont efficaces car les brochets sortent de fraie pour se nourrir puis s’orienter vers du jerking voire du twitching lorsque la température de l’eau est plus basse
Les gros softbaits
Les gros leurres souples font partie des armes absolues pour les gros brochets. Peu plombés ou en weightless, ils conservent une nage réaliste même à petite vitesse de récupération.
Les montages les plus répandus consistent à utiliser soit une TP classique ou un hameçon texan pour se faufiler dans les herbiers, soit en shallow (poids avec fixation s-crew à visser en tête de leurre) auquel on ajoutera un armement à la main (1 hameçon triple voire deux suivant la taille du leurre), ce dernier étant très utile pour éviter d’abimer le leurre et conserver toute la puissance de son rolling.
Au final, gardez toujours en tête que la pêche du brochet est avant tout une question d’instinct, réfléchissez et adaptez vous à votre environnement. Observez la caractéristiques du spot et mettez vous dans la peau du prédateur. Il n’y a pas de recette miracle si certains jours ce dernier ne veut pas mordre. Ne soyez donc pas fermé sur les techniques, leurres et coloris à employer mais n’hésitez pas à vous montrer créatif et à alterner autant que possible, votre session vous le rendra et votre pêche en sortira grandie.
